A lire, relire, méditer

Avant l’annexion, l’avocat Jean-Jacques Rey de Chambéry, livra un vibrant plaidoyer pour  l’indépendance de la Savoie dont les arguments peuvent être pour la plupart repris aujourd’hui tant ils sont limpides (solution pour la question savoisienne).

Notons qu’en 1874, Jean Jacques Rey se retira à la Grande Chartreuse, on eut été lassé du monde à moins après avoir connu l’annexion !

« Pourquoi tous les Savoisiens ne comprendraient-ils pas les avantages évidents de la solution que nous proposons (l’indépendance de la Savoie) ? Est-il un de nous qui aime les impôts écrasants ? Avec une Savoie indépendante, nous n’en aurons que d’insignifiants ; nous n’en aurons même qu’autant que nous le voudrons bien.

Est-il un de nous qui aime à voir l’État lui enlever un fils, un frère, un père pour les conduire à ces boucheries humaines qui déshonorent notre civilisation ?

Avec une Savoie indépendante, nous n’aurons plus besoin de soldats ; le laboureur restera à sa charrue, le négociant à son comptoir, l’homme d’étude dans son cabinet. Les gardes nationales suffiront à maintenir l’ordre public, quelques gendarmes à réprimer les méfaits. Est-il un de nous qui aime ces prohibitions douanières, ces droits exorbitants qui arrêtent si souvent l’essor de l’industrie ? Avec une Savoie indépendante, nous réglerons au gré de nos désirs ce qui se rattache à cet objet. Est-il un de nous qui soit satisfait des lenteurs qu’entraîne en toute chose la centralisation excessive des grands États, si funeste surtout pour les provinces éloignées ?

Avec une Savoie indépendante, rien ne s’opposera à   expédition des affaires. Avec une Savoie indépendante, nos intérêts moraux et matériels seront également sauvegardés. Nos intérêts moraux : parce que, appelé à veiller seul désormais  sur ses destinées, le pays n’aura plus à attendre que l’impulsion lui vienne d’une capitale quelconque; il sera obligé de mettre lui-même la main à l’œuvre, et l’on sait que le niveau intellectuel d’un peuple s’élève toujours à mesure que devient plus grande la part faite aux citoyens dans le maniement des affaires. Nos intérêts matériels : parce que, allégés de tous les impôts nécessaires à l’entretien d’une armée, nous dépenserons au sein même du pays le montant de ceux qui seront reconnus Indispensables ; — parce que, n’ayant pas besoin de troupes, nous pourrons laisser au travail tous les bras valides; — parce que, placée entre la France, la Suisse et l’Italie, notre petite province trouvera chez ces trois peuples un magnifique débouché pour les produits de ses mines, de son industrie et de son agriculture;— parce que la route à travers le mont Cenis participant à  notre neutralité, sera plus que jamais la grande voie de communication entre l’Allemagne et le  littoral méditerranéen, entre l’Angleterre et les Indes.— N’inspirant de craintes à personne, nous serons recherchés de tout le monde.

Nous pourrions multiplier à l’infini les avantages que nous offre la constitution de la Savoie en province indépendante dont la neutralité sera garantie par l’Europe. Les exemples cités ci-dessus nous paraissent suffire amplement à faire comprendre ceux que nous avons omis d’énumérer. Qu’on place maintenant en regard les quelques inconvénients, du reste essentiellement temporaires, que pourra nous offrir notre organisation intérieure ; qu’on les pèse avec impartialité, sans parti pris, sans prévention, et qu’on dise s’ils sont de nature à faire reculer un seul Savoisien qui ait tant soit peu à cœur de conserver à sa patrie son unité, son autonomie et son nom ».

2 Replies to “A lire, relire, méditer”

  1. Quand on vous réplique « on est français pis c’est tout! » ou  » Mais je suis français, je suis français » comme le faisait un sénateur haut-savoyard – tout comme geindrait un enfant à qui on va enlever son jouet préféré – lors d’une discussion prouvant les avantages d’une Savoie libérée du boulet français, il devient difficile d’amener des arguments, même facilement convaincants!

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