Réponse de l’OMP

Genève, le 12 avril 2016

Concerne : Croix de Savoie et plaque d’immatriculation

Monsieur le Président,

Mesdames, Messieurs,

Vous avez interpellé le Conseiller d’Etat Pierre Maudet, Chef du Département de la sécurité et de l’économie. arguant du fait que vos adhérents étaient harcelés par la police genevoise et amendés pour avoir apposé sur leur plaque d’immatriculation française un autocollant représentant le drapeau de Savoie.

Le dossier a été transféré à l’Organe de médiation de la police (OMP) comme objet de sa compétence et vous nous avez exposé vos doléances à l’occasion de notre séance du 22 février 2016 (cf. procès-verbal annexé). A cette occasion, vous avez demandé d’obtenir l’assurance que la police ne mettrait plus à l’amende les automobilistes dont les plaques d’immatriculation françaises des départements 73 et 74 arboraient le drapeau de Savoie, à l’endroit où figure normalement le logo de la région.

Vous nous avez expliqué qu’en vertu de la législation en vigueur, cet espace en haut à droite de la plaque constituait un espace de liberté à la disposition des Etats signataires de la Convention sur la circulation routière conclue à Vienne le 8 novembre 1968, à laquelle tant la République française que la Confédération suisse ont adhéré.

Nous avons examiné de manière approfondie la situation juridique, quand bien même nous ne sommes pas une autorité judiciaire, et nous avons échangé sur cette question avec l’Etat Major (EM) de la police, auprès duquel le soussigné de gauche s’est rendu pour discuter de la situation. Toute médiation doit en effet se déployer dans le cadre légal existant.

L’OMP et l’EM de la police ont la même analyse de la situation juridique, qui est la suivante .

En France, l’Arrêté du 9 février 2009 fixant les caractéristiques et le mode de pose des plaques d’immatriculation des véhicules décrit la constitution générale de la plaque, article 5, les éléments du numéro d’immatriculation, article 6, le contenu de la plaque, article 7, le symbole européen, article 8, l’identifiant territorial, article 9 et l’interdiction de modifier les plaques ou d’y ajouter quelque chose, article 10.

En particulier, l’article 9 dispose que .

« Les plaques d’immatriculation des véhicules portant le numéro définitif prévu à l’article R. 322 – 2 du Code de la route doivent comporter un identifiant territorial constitué par le logo officiel d’une région et le numéro de l’un des départements de cette région.

Le choix de cet identifiant territorial est libre et peut ne pas avoir de lien avec le domicile du titulaire du certificat d’immatriculation.

L’identifiant territorial doit être intégré dans sa globalité à la plaque d’immatriculation et être situé dans la partie utile de la plaque à l’extrémité droite de celle-ci, sur fond bleu non obligatoirement rétro-réfléchissant. »

La législation ultérieure promulguée en France sur ce même sujet, notamment en 2013, n’a rien changé à cette situation juridique.

Ainsi, d’après la législation française, on ne peut rien ajouter sur une plaque d’immatriculation. Par conséquent, un simple autocollant, même de bon format, est illégal.

En Suisse l’article 1 alinéa 5 de l’Ordonnance du Conseil fédéral suisse concernant les exigences techniques requises pour les véhicules routiers (OETV) dispose que .

« Les véhicules étrangers sont soumis à la présente ordonnance si celle-ci n’outrepasse pas les exigences des conventions internationales ou les règles de droit du pays d’immatriculation. »

L’article 45 alinéa 3 OETV dispose que .

« Les plaques de contrôle et les signes distinctifs de nationalité ne doivent pas être modifiés, déformés, découpés ou rendus illisibles. Un véhicule ne peut porter que le signe distinctif de nationalité du pays d’immatriculation.  »

Le fait que les autorités de police françaises n’interviennent pas contre les automobilistes arborant le drapeau de Savoie sur leur plaque n’est pas décisif en soi. Comme l’essentiel reste qu’il faut pouvoir identifier le détenteur du véhicule, l’EM de la police considère qu’il s’agit en soi dune violation de très peu de gravité au sens de l’article 100 chiffre 1 de la Loi sur la circulation routière. Cet article, qui traite des conditions de la répression, dispose en son chiffre 1

« Sauf disposition expresse et contraire de la loi, la négligence est aussi punissable. Dans les cas de très peu de gravité, le prévenu sera exempté de toute peine. « 

C’est pourquoi la police n’a émis ni ordre, ni directive interne d’agir contre ceux qui placent le drapeau de Savoie sur la plaque. Rien qui permette de parler d’un acharnement particulier, la police genevoise ayant d’autres affaires nettement plus urgentes à régler.

Toutefois, lors d’un contrôle, par exemple à la frontière, les policiers sont en droit de réagir, avec la précision que le policier reste libre de dénoncer ou non cette infraction, puisque ces contrôles ne sont pas faits pour débusquer les porteurs d’écussons de Savoie, mais essentiellement pour contrôler l’état des conducteurs et l’état des véhicules.

II est d’ailleurs arrivé, sans que cela puisse valoir précédent, que les policiers demandent aux automobilistes arborant un drapeau de Savoie sur leur plaque de l’enlever sur-le-champ, ce qui n’a, selon eux, jamais causé le moindre problème.

On ne peut demander à la police de renoncer à sanctionner les irrégularités constatées d’autant que celles-ci n’ont en règle générale pas trait à la seule présence de l’écusson de Savoie sur la plaque. En définitive, selon le nombre d’anomalies et les explications données par le contrevenant et la nature de l’intervention de la police, c’est le policier qui reste juge de dénoncer cette contravention ou non.

Aucune contravention n’ayant été contestée à ce jour, nous ne savons pas quelle serait la position des tribunaux. Il se pourrait que ces derniers acquittent les contrevenants ou reconnaissent qu’il s’agit d’une infraction de peu de gravité ou encore décident de confirmer la sanction, voire l’alourdir.

Une alternative paraissant opportune serait d’apposer l’autocollant du drapeau de Savoie à côté de la plaque, sur la carrosserie du véhicule, ce qui est tout à fait apte à manifester son attachement à la Savoie, sans enfreindre aucune législation.

Nous aimerions enfin souligner que l’OMP n’a pas pour vocation de livrer des avis de droit et que cette affaire lui a été confiée du fait que vous vous étiez plaints d’un acharnement de la police. C’était, de notre point de vue, la raison principale de notre saisine et nous constatons que cet acharnement n’est absolument pas avéré.

En conclusion et après avoir procédé à des investigations approfondies, «I ‘OMP peut vous assurer qu’il n’y a pas d’acharnement particulier contre les automobilistes ayant apposé l’autocollant portant l’écusson de Savoie sur leur plaque d’immatriculation, ni de volonté ciblée de s’en prendre à des Savoisiens du simple fait qu’ils manifestent leur attachement à la Savoie par cet autocollant, mais simplement la vérification, très modérée et non systématique, du respect des normes en vigueur.

En espérant avoir ainsi répondu à vos inquiétudes, nous vous présentons, Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs, nos salutations distinguées.

 

Annexe copie du procès-verbal de la réunion du 22 février 2016
Copies Monsieur Pierre Maudet, Conseiller d’Etat – Etat-major de la police